La mastite est une affection courante et douloureuse qui touche de nombreuses femmes, en particulier les mères qui allaitent. Cette inflammation du sein engendre parfois de grosses complications dans le processus de l’allaitement. Son effet sur la qualité de vie des mères concernées n’est pas à négliger.
Des symptômes caractéristiques de la mastite aux traitements recommandés pour la gérer en passant par les moyens de soulager la douleur et l’inconfort, voici tout ce qu’il y a à savoir sur la mastite qui survient en période d’allaitement.
La mastite est une inflammation des tissus mammaires qui survient principalement dans le cadre de l’allaitement, bien qu’elle puisse aussi se développer chez les femmes qui n’allaitent pas, et même chez les hommes. Il faut savoir que la réaction inflammatoire constitue une défense immunitaire du corps contre une agression.
Dans le cas de la mastite, c’est l’accumulation de lait dans les canaux (par suite d’une obstruction ou d’un engorgement) qui va déclencher la réaction inflammatoire. Les tissus mammaires étant étirés et irrités, le corps donne l’alarme pour protéger l’intégrité du sein. Il provoque une attaque des tissus, afin d’éliminer la potentielle menace, qui ici n’en est pas une puisque le lait accumulé résulte simplement d’un souci de drainage dans les canaux et non d’une attaque extérieure.
Souvent, la mastite s’accompagne d’une infection par une bactérie. Les bactéries prolifèrent dans le lait qui stagne au niveau des canaux obstrués. Elles pénètrent plus facilement dans le sein si celui-ci présente des crevasses ou des fissures.
D’après une étude menée sur des femmes primipares australiennes, la prévalence de la mastite est d’environ 17% des mères(1) ayant choisi d’allaiter, avec la moitié des épisodes de mastite se déroulant pendant les 4 semaines de post-partum.
Les symptômes de la mastite évoquent ceux d’une grippe, ce qui peut amener la mère à confondre les deux maladies. Néanmoins, la mastite reste liée à un développement de l’inflammation localisé au niveau des seins, et c’est en observant la poitrine de la patiente que le professionnel de santé peut établir le diagnostic.
Parmi les symptômes les plus courants de la mastite, il faut relever :
– la présence d’une douleur intense et constante dans le sein concerné, plus rarement dans les deux seins ;
– le dégagement de chaleur perçu au toucher de la peau du sein atteint ;
– la présence d’une rougeur, d’un gonflement, d’une peau tendue et luisante sur le sein ;
– de la fièvre, généralement supérieure à 38,5°C ;
– des frissons, générés par l’augmentation de la température corporelle ;
– un malaise global, de la fatigue et de l’inconfort ;
– l’engorgement du sein avec une hausse de production du lait ;
– des difficultés pour le bébé à téter à cause de l’inflammation locale.
L’inflammation du sein résulte avant tout d’une accumulation de lait dans les canaux galactogènes. Celle-ci se produit souvent lors d’une situation d’engorgement non résolue, qui contribue à l’inflammation des tissus en profondeur. Si l’un des canaux est bouché, ou que le bébé ne tète pas suffisamment par rapport à la production maternelle, le lait s’agglutine dans le sein et provoque la réaction inflammatoire. Si la mastite est seulement inflammatoire, les examens ne révèlent pas de présence particulière de bactérie pathogène.
Un certain nombre de mastites évoluent vers l’infection. La cause la plus fréquente de la mastite infectieuse est la colonisation du sein par un Staphylocoque doré(2), retrouvé plus fréquemment sur les seins affectés des femmes que sur les seins non touchés par la mastite. Cette situation se produit plus facilement lorsque le mamelon présente des crevasses, des fissures et des irritations qui sont autant de portes d’entrée pour la bactérie. D’autres bactéries déclenchent aussi des mastites infectieuses, comme le Streptocoque et l’E. coli.
Certaines femmes sont effectivement plus à risque en ce qui concerne le développement d’une mastite pendant la période d’allaitement.
Les éléments susceptibles de déclencher une mastite concernent toutes les situations à risque de stase du lait(3), telles que :
– les seins abimés et colonisés par une bactérie, notamment par le Staphylocoque doré ;
– l’allaitement irrégulier ou soumis à un programme précis qui ne respecte pas le principe de l’offre et de la demande ;
– la sautée de certaines tétées ;
– les problèmes de succion ou de position d’allaitement qui conduisent à un drainage inefficace du sein par le bébé ;
– la maladie de la mère ou de l’enfant ;
– la production excessive de lait maternel ;
– le sevrage trop rapide ;
– la pression exercée sur la poitrine par des vêtements trop serrés ;
– la présence d’une tache blanche sur le sein, ou de cloques qui manifestent une réaction inflammatoire locale ;
– l’obstruction d’un canal galactophore ;
– le stress et la fatigue maternels ;
– l’allaitement de jumeaux ou de triplés.
Enfin, l’accouchement par césarienne induirait un risque de 1,46 fois plus élevé de connaître une mastite qu’en cas d’accouchement par voie basse, d’après cette étude(4) menée sur plusieurs populations africaines.
La meilleure façon de prévenir la mastite au cours de l’allaitement est de pratiquer l’allaitement à la demande, c’est-à-dire de donner le sein à l’enfant dès qu’il le demande. De cette façon, le rapport entre la production de lait et les besoins du bébé est le plus proche possible de 1. Cela évite les situations d’engorgement, donc la dégénération en mastite.
Le lavage des mains reste une pratique essentielle pour éviter de disséminer des bactéries au niveau de la poitrine. En revanche, il est préférable de ne pas désinfecter ou nettoyer les seins plus d’une fois par jour, pour ne pas abîmer la peau et créer des fissures propices à l’infection.
La préparation physique des seins à l’allaitement n’a pas d’influence(5) sur le risque de connaître une mastite ou non par la suite.
Parfois, l’engorgement est inévitable, notamment au cours de la montée de lait ou lors d’une séparation de la dyade mère/bébé. Il faut alors prendre des mesures rapides pour contrer cet engorgement.
L’allaitement est recommandé en cas de mastite, car il aide à drainer le sein et à soulager l’engorgement.
La consultation avec un professionnel de santé est indispensable pour établir le traitement approprié en cas de mastite. En attendant ou en complément, il est possible d’utiliser des techniques naturelles pour apaiser la mastite et favoriser sa guérison.
Dès les prémices d’un engorgement sévère, la mère devrait faire vérifier la position d’allaitement et la prise du sein par une sage-femme, un médecin ou une conseillère en lactation. Cette première étape résout une partie des situations problématiques, et évite que l’inflammation soit doublée d’une infection.
La douleur perturbe souvent l’allaitement, mais il est essentiel de maintenir les tétées du mieux que possible pour favoriser l’écoulement du lait. La mère peut commencer par donner le sein affecté, si elle y parvient, afin de déboucher les canaux. Le cas contraire, elle commencera par allaiter du côté non affecté avant de proposer le sein douloureux. Si la tétée est véritablement impossible, la mère peut tirer du lait à la main ou au tire-lait.
Lorsque la douleur est trop importante, un professionnel de santé peut prescrire des analgésiques afin de soulager la mère et de faciliter l’éjection du lait. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens, AINS, comme l’ibuprofène ou le naproxène aident à réduire la douleur et l’inflammation.
La prise de probiotiques a démontré son efficacité en cas de mastite infectieuse, puisque la souche Lactobacillus(6) permet notamment d’abaisser le taux de Staphylocoque présent dans le lait maternel. Les probiotiques améliorent également la qualité de la flore intestinale de la mère, que l’on sait impliquée dans la réponse immunitaire, et participent à diversifier la flore intestinale de l’enfant nourri au sein.
Enfin, pour soutenir le système immunitaire, le repos est recommandé autant que possible.
La plupart du temps, si les symptômes persistent ou s’aggravent au cours des 12 heures, le médecin prescrit un antibiotique pour traiter l’infection. Le traitement doit être suivi pendant toute la durée indiquée, et être compatible avec l’allaitement.
Si la mastite est provoquée par un Staphylocoque doré résistant à la méticilline, SDRM, le médecin va prescrire plusieurs antibiotiques jusqu’à ce que la mastite se résorbe. En cas de persistance des symptômes, des examens approfondis seront menés pour dépister un éventuel abcès ou une résistance bactérienne.
Pour prévenir la formation d’un abcès, qui est la complication la plus courante de la mastite, une étude a démontré l’intérêt de pratiquer un massage du sein(7) dans le but d’extraire du pus lors d’une mastite sévère installée depuis plusieurs jours. En cas de présence de pus lors du massage, la mère doit renouveler le massage toutes les 2 à 4 heures, et ce tant qu’il reste du pus dans le sein. En complément de cette mesure, bébé doit être mis au sein régulièrement. La culture du pus récolté permet de prescrire un antibiotique efficace dans le cas où le massage ne suffit pas à améliorer les symptômes après 24 heures.
Parmi les traitements naturels contre la mastite, les plus efficaces sont les suivants :
– les compresses chauffantes avant l’allaitement pour stimuler l’écoulement du lait ;
– les compresses froides après la tétée pour soulager la douleur et l’inflammation ;
– le massage des seins(8), qui pourrait réduire le risque de mastite lorsqu’il est pratiqué en prévention ;
– l’apprentissage de plusieurs positions d’allaitement pour varier les zones du sein drainées lors de la tétée.
La Haute Autorité de Santé recommande la poursuite de l’allaitement(9) dans le cadre d’un traitement contre la mastite, dans la mesure où l’écoulement du lait par le sein contribue à drainer les canaux et à résoudre la situation inflammatoire.
Le lait maternel consommé pendant une mastite est généralement sans danger pour le nourrisson en bonne santé, car il contient des cellules immunitaires qui combattent les bactéries et protègent le bébé des infections. D’autre part, les bactéries ingérées par l’enfant sont détruites en grande partie lors de la digestion, dans l’estomac.
Certains signes ne laissent pas la place au doute et nécessitent une consultation médicale rapide. Il s’agit notamment des symptômes suivants :
– température corporelle supérieure à 38,5°C ;
– frissons et manifestations physiques de la fièvre ;
– rougeur et gonflement important de la peau du sein avec une chaleur localisée ;
– douleur difficile à supporter ;
– présence de pus ou de sang dans le lait ou au niveau du mamelon ;
– fatigue générale et malaise inexpliqué par les causes habituelles.
Si certains symptômes persistent ou s‘aggravent après un traitement, ou si de nouveaux symptômes apparaissent, il faut retourner voir le médecin au plus vite afin d’éviter la septicémie, une infection très grave qui se propage dans tout le corps.
À savoir : les examens ne sont nécessaires que dans certains cas, notamment lorsque la mastite récidive, ou qu’elle semble anormale et grave. La présence d’une bactérie pathogène(10) est en effet souvent associée à des symptômes persistants de mastite. Le lait est alors recueilli et examiné en laboratoire afin d’identifier la ou les bactéries présentes en excès, ce qui peut permettre d’ajuster le traitement de façon spécifique.
Engorgement | Mastite | |
Intensité de la douleur | Légère à modérée, soulagée par l’expression du lait | Élevée et constante, semblable à une piqûre ou une brûlure |
Localisation de la douleur | Dans tout le sein | Dans le sein et parfois plus précisément sur une zone triangulaire |
Symptômes | Sensation de lourdeur, de pesanteur dans le sein, peau brillante et tendue, hausse de la production de lait | Douleur et rougeur de la peau du sein, hausse de la température de la peau, fièvre et frissons, fatigue |
Présence de fièvre | Non, ou légère | Oui, supérieure à 38,5°C |
Traitements recommandés | Drainage des seins, application de compresses froides ou chaudes, analgésiques si besoin | Traitement antibiotique contre l’infection et analgésique pour la douleur |
Cause habituelle | Production de lait trop importante, drainage insuffisant du sein | Engorgement sévère, infection du sein par une bactérie |
Complication possible | L’engorgement peut évoluer en mastite en cas d’infection ou s’il n’est pas résolu. | La mastite peut se propager dans d’autres zones du corps, engendrer un abcès du sein par excès de pus ou une septicémie, une infection généralisée grave. |
Retrouvez ici toutes les questions fréquentes que se posent les mamans au sujet de la mastite.
Cette forme rare de cancer du sein se manifeste par une inflammation et une apparence proche de celle de la mastite infectieuse. La peau du sein s’épaissit, rougit, et le mamelon peut se rétracter. Le diagnostic est établi par biopsie et après un examen histopathologique. Selon le stade de la mastite carcinomateuse, le traitement inclut de la chirurgie, de la radiothérapie, de la chimiothérapie ou une combinaison de ces approches.
La mastite granulomateuse est une inflammation chronique du sein, rare mais bénigne. Elle produit des nodules durs dans la poitrine, une douleur et une enflure du sein. Si son étiologie reste souvent méconnue, elle serait associée à des réactions auto-immunes ou à des infections. Le traitement peut inclure la prise d’anti-inflammatoires(11), d’antibiotiques ou de corticostéroïdes, ou une chirurgie afin d’ôter les tissus inflammés.
Oui, vous pouvez parfaitement tirer votre lait dans le cadre d’une mastite. Le tire-lait et l’expression manuelle soulagent l’engorgement et favorisent la guérison, surtout si bébé ne tète pas assez. En réduisant la pression, le fait de tirer du lait améliore également la circulation sanguine et la réaction immunitaire dans le sein.
Avec un traitement approprié, la mastite s’estompe normalement dès les 24 à 48 heures suivant la première prise. Il est important de bien continuer à prendre le traitement même en cas de disparition des symptômes pour assurer une guérison complète, qui survient au bout d’une à deux semaines.
D’après la HAS, l’arrêt de l’allaitement(9) au cours d’une mastite n’est pas sans risque, puisqu’il peut induire la formation d’un abcès dans le sein concerné. Si le fait de donner la tétée est trop douloureux, la mère peut essayer d’extraire son lait à la main ou à l’aide d’un tire-lait. Le sevrage pouvant induire une situation d’engorgement, il n’est pas recommandé pendant une mastite, qui résulte déjà d’une situation d’engorgement.
Il est peu probable que l’enfant allaité ingère du pus provenant de l’abcès, puisque ce dernier n’est généralement pas relié aux canaux lactifères. Dès lors, la littérature scientifique va plutôt dans le sens d’une poursuite de l’allaitement(12), des deux côtés ou seulement d’un côté en fonction de la situation et de la pénibilité ressentie par la mère. En cas de doute, prenez conseil auprès d’une conseillère en lactation ou d’un médecin.
(1) A descriptive study of mastitis in Australian breastfeeding women: incidence and determinants : Lisa H Amir, Della A Forster, Judith Lumley and Helen McLachlan, 2007.
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC1868722/
(2) Bacteriological findings and clinical symptoms in relation to clinical outcome in puerperal mastitis : I Matheson, I Aursnes, M Horgen, O Aabø, K Melby, 1988.
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/3250184/
(3) Mastite : Causes et prises en charge : Organisation Mondiale de la Santé, 2004.
https://iris.who.int/bitstream/handle/10665/68543/WHO_FCH_CAH_00.13_fre.pdf
(4) Prevalence of and factors associated with lactational mastitis in eastern and southern Africa: an exploratory analysis of community-based household surveys : Mariame O. Ouedraogo, Lenka Benova, Tom Smekens, Gezahegn G. Sinke, Abraha Hailu, Herbert B. Wanyonyi, Madalitso Tolani, Caristus Zumbe & Ibukun-Oluwa O. Abejirinde, 2022.
https://internationalbreastfeedingjournal.biomedcentral.com/articles/10.1186/s13006-022-00464-x
(5) Mastitis today: incidence, prevention and treatment : S Jonsson, M O Pulkkinen, 1994.
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/8092782/
(6) Impact of Maternal Nutritional Supplementation during Pregnancy and Lactation on the Infant Gut or Breastmilk Microbiota: A Systematic Review : Aneesa Z. Zaidi, Sophie E. Moore and Sandra G. Okala, 2021.
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC8067242/
(7) Stripping out pus in lactational mastitis: a means of preventing breast abscess : H Bertrand and L K Rosenblood, 1991.
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC1335632/
(8) Interventions pour la prévention de la mastite du post‐partum : Maree A Crepinsek, Emily A Taylor, Keryl Michener, Fiona Stewart, 2020.
https://www.cochranelibrary.com/cdsr/doi/10.1002/14651858.CD007239.pub4/full/fr
(9) Allaitement maternel : mise en oeuvre et poursuite dans les 6 premiers mois de vie de l’enfant : Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé (ANAES), 2002.
https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/Allaitement_recos.pdf
(10) ABM Clinical Protocol #4: Mastitis : Judith Lumley Centre, La Trobe University, Royal Women’s Hospital, Melbourne Australia, 2014.
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4048576/
(11) La mastite granulomateuse idiopathique: à propos de 4 cas et revue de littérature : Hind Ennasser,& Jamal Eddine Raoudi, Hafsa Taheri, Hanane Saadi et Ahmed Mimouni, 2020.
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7755357/
(12) When Breast-feeding is not Contraindicated : Jack Newman, 1991.
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7755357/
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